Repères de rémunération du travail de l'art
[Mise à jour de l’article de 2021 sur la rémunération des artistes plasticien·nes]
Combien payer les artistes-auteur·rices, et comment ? Alors que différents réseaux de professionnel·les artistiques publient leurs préconisations, les discussions sur l’argent deviennent incontournables. Faisons le point ensemble.
Artiste plasticien·ne, critique d’art, médiateur·rice culturel·le ; pour une expo solo ou collective ; production spéciale ou prêt simple ; conférence ou atelier pratique… La palette des activités qu’on demande aux travailleur·ses de l’art a toujours été très vaste. La bonne nouvelle, c’est que des références existent pour savoir quelles rémunérations demander dans quelles situations! Une mise à jour s’imposait depuis mon dernier article sur cette question.
I. Artistes plasticien·nes invité·es par une structure de diffusion
La plupart des référentiels de rémunération s’appuient sur les actions les plus communément proposées aux artistes : l’exposition dans une structure de diffusion, soit un lieu physique. Même dans ce cadre restreint on a une variété d’actions possibles, de types de rémunération, de déclinaisons du droit d’auteur à prendre en compte. Ces barèmes sont précieux pour cadrer la partie non seulement financière mais aussi parfois logistique voire juridique d’une collaboration artistique.
Référentiel produit par le réseau de centres d’art contemporain DCA
Le réseau de développement des centres d’art contemporain, DCA, a sorti en 2023 une mise à jour de ses préconisations de 2019. Les montants ont peu évolué, mais nouveauté : en plus des recommandations minimales, le réseau affiche un montant « cible » comme horizon souhaitable.
Pour voir le référentiel : c’est ici.
Astre, Réseau arts plastiques et visuels en Nouvelle-Aquitaine
Le réseau Astre a lui aussi mis à jour son référentiel. Et il précise les conditions de partage — on le remercie pour ça!
En bonus : la page linke vers une calculatrice pour calculer au plus près la rémunération à demander / à proposer.
⚠️ Toujours le même avertissement : ce sont des préconisations, et non des limites max 😉
Pour consulter les reco de Astre, c’est là.
Devenir.art, mise à jour 2024
Devenir art, réseau des arts visuels en région Centre-Val-De-Loire, a lui aussi mis à jour son référentiel, établi en lien avec celui de Astre et du Caap notamment.
La page dédiée sur le site du réseau permet d’en apprendre sur la logique du référentiel et d’accéder à une calculatrice pour estimer rapidement une rémunération, sans parcourir tout le pdf.
Cela dit, la lecture du pdf permet d’avoir un aperçu de la diversité et la complexité des modes de collaboration avec les artistes, ça peut servir à toustes les travailleur·ses de l’art !
Accès à ladite page et à la calculatrice : clic.
Le CAAP, Comité pluridisciplinaire des artistes-auteurices
Cité comme partenaire pour l’élaboration de la grille tarifaire partagée par Devenir art, le Caap indique sur son site des préconisations datant de mai 2023.
Artistes en Suisse : le travail de Visarte Genève et Visarte Suisse
Ce réseau d’artistes réparti sur l’ensemble de la Suisse a élaboré, via son antenne genevoise, une calculatrice pour estimer la rémunération juste, en CHF.
Ça se passe par ici.
II. Artistes accueilli·es en résidence
Au-delà de l’exposition du travail artistique, il y a l’aide à la création sous la forme de résidence. Le réseau Arts en résidence, qui rassemble des lieux de résidences dans les arts visuels, a été fondé en 2010 dans l’optique de structurer (entre autres) cette activité particulière au sein du monde de l’art. La préconisation de montants minimaux à verser aux artistes accueillis en résidence, quelle que soit le but de celle-ci (de recherche, de production, ou autre), fait partie des enjeux majeurs de cette structuration.
Le réseau a d’abord publié en 2023 un Repère pour un minimum de bourse de création et de recherche dans le cadre d’une résidence d’artiste-auteur·rice, accessible ici
Plus récemment, en association avec le Pôle arts visuels des Pays de la Loire, le réseau Arts en résidence a sorti un référentiel plus précis et très instructif pour tout·e acteur·rice de l’art qui souhaite comprendre la complexité d’une résidence.
On y trouve notamment :
- un déploiement des activités possibles incluses dans ce qu’on appelle une résidence artistique
- ainsi que, pour chaque activité, le type de revenu attendu
- une chronologie détaillée des étapes possibles avant, pendant et après une résidence
- des renvois à des notions de droits d’auteur·rices et types de contrat cadrant chaque étape.
Pour consulter et télécharger le document complet, hop.
III. Médiateur·rices en art contemporain
Que seraient les expos, les restitutions et les sorties de résidence sans le travail des médiateur·rices de l’art contemporain ?
Dans une perspectivede reconnaissance de cette profession pivot, le réseau Bla! rassemble depuis 2017 les acteur·rices de la médiation culturelle dans l’art contemporain. Parmi leurs chantiers se trouve notamment l’établissement d’une charte de bonnes pratiques, sortie en 2022 et accessible ici.
En complément, le réseau vient de sortir un référentiel de métiers et de rémunérations. La richesse de ce travail réside, là encore, dans la pluralité des situations exposées, qui permet de faire le point sur les différents types de postes et de fonctions occupées en matière de médiation. De plus, on trouve aux côté du référentiel édité par Bla! des ressources issues de secteurs voisins tels que le spectacle vivant et l’édition jeunesse.
Pour le lire et le relire, paf.
IV. Commissaires d’expo et critiques d’art
Autres acteur·rices clefs accompagnant les artistes dans divers événements culturels : les critiques et commissaires d’expo.
C-E-A, association française des commissaires d’exposition
Rassemblés au sein du réseau C-E-A depuis 2006, iels ont établi très récemment un guide pour la rémunération du travail de commissariat d’exposition. Plus qu’un barème de chiffres, il s’agit d’une véritable visite guidée dans le fonctionnement social et fiscal du métier.
La richesse de cette initiative est d’être complémentaire avec les guides évoqués jusqu’à présent. L’association précise en effet que ce guide s’applique à l’activité de commissariat d’expo, et renvoie aux recommandations faites par d’autres réseaux pour les activités annexes telles que la rédaction, la médiation, etc.
Ce guide est accessible ici, hop.
AICA France, section française de l’association internationale des critiques d’art
L’association AICA est la plus ancienne que tous les réseaux cités dans cet article. Peut-être pour ça, elle n’y va pas par quatre chemins :
Les recommandations tarifaires de l’AICA-France constituent une référence pour les critiques d’art comme pour les commanditaires. Elles offrent un barème en-dessous duquel les parties se mettent hors-champ d’exigence, de capacité et de respect mutuel.
BAM. Si tu paies moins, laisse tomber le respect, la capacité à faire le job et l’exigence de qualité, ok ? Cet avertissement est même écrit en majuscules (mais je n’aime pas trop utiliser les majuscules dans mes posts ici), au cas où on aurait envie de ne pas en tenir compte.
En tout cas, c’est sur cette page que sont rassemblées les préconisations de montants, ainsi que la logique de calcul — qui donne en fait un éclairage certain sur la meilleure manière de travailler avec les auteur·rices en art.
En bref
En bref, avant de parler d’argent et te sentir mal parce que tu ne sais pas où tu mets les pieds, renseigne-toi ! Tous ces collectifs, réseaux, syndicats et autres assos de professionnel·les font un travail super, qui donne de la force à toustes les travailleur·ses de l’art. Évidemment, toutes ces grilles de tarifs n’ont pas à être immuables, et tu auras toujours le droit d’accepter d’autres conditions. Le principal, c’est d’être honnête avec toi-même sur l’intérêt que tu as à accepter ces conditions.
Ma conclusion tient en 3 points :
- L’information et le savoir donnent du pouvoir : appuie-toi sur les ressources et les forces en présence
- Demander de l’argent pour son travail, c’est légitime
- Négocier à l’oral, ça coûte rien d’essayer. Au pire tu peux rétropédaler avec un « Je m’en serais voulu·e de ne pas demander » !